Techniques de la lumière

Publié le 2 Février 2012

I Les projecteurs sur lyres asservies dans les studios de télévision

 

16 Alpha Wash 1200

13 Alpha Spot HPE

8 Vari Lite 2000

26 VariLED

14 Studiocolor 575

 

Les projecteurs automatiques

sur lyres asservies

montés sur porteuses mécaniques,

par câbles DMX sont reliés à la console,

une GrandMA 2048 Full size.

 

A l’allumage du système on entend

Les lampes claquent et vibrent et soufflent,

50 au plafond panotent à 540°,

50 au plafond tiltent à 260°,

Quand les corps longs des découpes

Tournent leurs 8 bagues crantées.

 

La relation du technicien à la machine est belle et juste,

Son plaisir profond.

 

L’électricien éclairagiste

Qui la porte et l’accroche avec son dos, qui tire les câbles et l’alimente.

Le pupitreur

Qui programme les mouvements, qui programme les couleurs.

Le directeur de la photographie

Qui est une star, qui a des jeans et des chaussures très chères.

                              

 

A la télévision on fait la lumière sur un siège, sur un marquage au sol, sur un stagiaire.

 

A cet endroit se placent indifféremment :

Claire Chazal, Christine Lagarde, Jack Lang, Sandrine Quettier, Jean Pierre Pernod, Sarkozy, Royal, Strauss Kahn, Bouygues, Pompidou, De Gaulle, Pétain, Hitler, Napoléon, Louis XIV, Charlemagne, Ramsès 2.

 

Souvent je pense au projecteur Alpha Wash 1200, et à Leni Riefenstahl.

A la national portraits Galery à Londres, aux visages de tous les salauds, de tous les puissants d’une histoire écrite, par et pour eux,

M’étonnant qu’on chuchote devant les tableaux.

 

Souvent je pense au projecteur Alpha Wash 1200, à Leni Riefenstahl,

Et à l’hypocrisie.

 

II Les mandarines dans le cinéma autoproduit

 

Puis on tourne un film autoproduit c’est-à-dire bénévole c’est-à-dire avec deux mandarines.

 

Et c’est comme d’aller travailler son champ à la binette après avoir connu un tracteur John Deer.

Sur les tournages autoproduits il n’y a plus de pause syndicale

Il n’y a plus d’heure supplémentaire

Il n’y a plus de consigne de sécurité.

 

J’ai dit souvent, tels ces agriculteurs bio de Bretagne ou d’Arriège revenus à la terre, fiers de survivre,

J’ai dit souvent que nos films libres étaient révolutionnaires.

 

En vérité je ne peux pas ignorer l’existence des tracteurs qu’utilise Monsanto, et l’intelligence de leurs mouvements.

 

Nous nous sommes posés une fausse question.

Il ne s’agit pas de se déterminer en faveur des semences libres contre la technique industrielle.

 

La pauvreté n’est ni naturelle ni enviable, elle rend les hommes méchants.

 

A regarder les montagnes, les ciels,

Les arbres au moment des fruits,

Nous est donné le sentiment de l’abondance,

Celui là-même qui nous arrive dans un studio de TF1.

 

 

Nous avons filmé nos cuisines, nos éviers, nos poubelles.

 

Mais le cinéma appelle aussi l’amplitude des ciels et des foules,

Et ce n’est pas fasciste.

Nous avons droit aux milliers de figurants pour raconter l’histoire humaine,

Aux meilleures machines, à tout l’argent.

 

Nous ne voulons pas 2 mandarines, nous voulons tous les projecteurs en plus du soleil.

Nous ne voulons pas brûler TF1. Nous voulons brûler Martin Bouygues qui est une sorcière, et Hitler, et de Gaulle, et Napoléon.

 

C’est assez de raconter les histoires des rois et des patrons, de chuchoter au musée devant leurs visages mystifiés.

 

Nous voulons raconter nos histoires et celles de nos frères.

Ce faisant déployer tout l’art, toutes les connaissances, et travailler bien.

 

 

Mathilde Nègre

En introduction à la projection du Cinémaginaire d’Eloïse Callewaert

Paris 1er juillet 2011

publié dans Ah c'est bite moulante

Rédigé par Mathilde Nègre

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article